- ZHANG DAQIAN
- ZHANG DAQIANZHANG Daqian 1899-1983Zhang Daqian (Tchang Ta-ts’ien), qui mourut à Taibei le 2 avril 1983, âgé de quatre-vingt-quatre ans et entouré de la vénération nationale, passe pour avoir été le plus célèbre des peintres chinois contemporains. Sa renommée s’étendant des élites culturelles et politiques jusqu’à l’homme de la rue fit de lui une véritable institution. Le côté pittoresque du personnage, sa jovialité, son mode de vie opulent et anachronique, sa gourmandise proverbiale en vinrent à tenir une place presque aussi considérable que sa production elle-même, dont le succès lui valut de battre les records des cotations de la peinture chinoise contemporaine sur le marché international de l’art.Il ne fit certes pas œuvre de novateur: sur l’arrière-plan bigarré des expérimentations des peintres chinois du XXe siècle à la recherche de la modernité, l’œuvre de Zhang Daqian apparaît plutôt comme l’incarnation vivante et intemporelle de formes et de valeurs esthétiques du passé. Le succès exceptionnel de son œuvre soulève ainsi, en dehors de son cas particulier, le problème de l’importance de la tradition dans le concept même de la création picturale en Chine.Zhanq Daqian naquit en 1899 dans une famille aisée du Sichuan. Son talent artistique se manifesta très tôt: c’est dans son entourage familial qu’il reçut ses premières leçons de pinceau. Après une captivité de cent jours parmi une troupe de hors-la-loi, auxquels il réussit à faire apprécier ses talents de calligraphe, il fut envoyé par sa famille au Japon pour faire des études techniques de teinture textile. Il y pratiqua également la peinture. De retour en Chine en 1919, il fit une brève et malencontreuse expérience de vie religieuse; il en conserva son nom bouddhique, Daqian, qu’il utilisa concurremment avec son nom civil, Zhang Yuan. Son frère aîné, Zhang Shanzi, peintre d’un certain renom, l’introduisit dans les milieux artistiques de Shanghai. Il n’y fut guère attiré par les écoles contemporaines, mais s’attacha à acquérir une érudition littéraire et épigraphique auprès de deux lettrés prestigieux, Ceng Xi (1861-1930) et Li Ruiqing (1867-1920), et profita de la présence de riches collections privées pour former son jugement et pratiquer la copie.Ses dons exceptionnels lui permirent bientôt de dominer avec une aisance déconcertante tout le répertoire technique et stylistique du passé. Il fit figure de jeune prodige en travaillant soit en éclectique, soit en copiste virtuose: ses faux Shitao et Bada Shanren, entre autres, trompèrent — et dans un certain nombre de cas continuent encore à tromper — la perspicacité des collectionneurs et des marchands et lui valurent quelquefois le titre de «Van Meegeren de l’Orient». Le succès et le profit qu’il retira de ces activités lui permirent de rassembler une importante collection personnelle de peintures anciennes dont certains chefs-d’œuvre font aujourd’hui la gloire du Gugong de Pékin et d’autres musées chinois et étrangers. Vers 1930, sa renommée de peintre, d’expert et de collectionneur s’étend au Japon et il participe à des expositions à Paris (1933) et à Londres (1935).L’occupation japonaise, en 1937, le surprend à Pékin d’où il s’échappe en direction des zones libres. Pendant deux ans — entreprise assez colossale — il s’emploie à copier les fresques bouddhiques de Dunhuang: il excelle à restituer l’aspect original des œuvres, de manière un peu «léchée» sans doute, mais en évitant la sécheresse des reproductions mécaniques. Exposées après la guerre en Chine et, en 1956, à Paris, ses copies renouvelèrent l’intérêt des milieux artistiques chinois pour la peinture de personnages.Lors de l’arrivée au pouvoir du régime communiste, Zhang Daqian émigra successivement en Argentine, au Brésil et aux États-Unis tout en voyageant régulièrement et en exposant un peu partout dans le monde. À la fin des années 1960, atteint par une semi-cécité, il renouvela sa manière en utilisant une technique d’«encre éclaboussée», traditionnelle également, qu’il développa avec une ampleur sans précédent dans des paysages faits de larges coulées d’encre monochrome. Il fut moins heureux par la suite en poursuivant dans cette voie à l’aide de colorants denses et opaques dont l’aspect rappelle la peinture acrylique.En 1978, il se fixa définitivement à Taiwan. Sa dernière œuvre, un vaste panorama du mont Lu, couvrant plus de douze mètres carrés et destinée à orner le vestibule d’un hôtel de Yokohama, témoigne du goût qu’il cultiva durant sa carrière pour des compositions de format monumental, parmi lesquelles on retiendra surtout ses célèbres peintures de lotus géants.
Encyclopédie Universelle. 2012.